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A Rascal’s Tale (1991) de Dick Cho Kin-Nam (scénariste et réalisateur) dépeint le portrait de jeunes voguant entre scolarité difficile et attitude exaltée.
Un soir, alors qu’il est enfant, Pang assiste à l’agression de son père et de sa mère par des voyous. Son père, On (Shing Fui-On) est un malfrat reconnu. Suite à cet épisode, sa mère lance un ultimatum à On qui quitte le foyer familial avec son fils. Quelques années plus tard, Pang (Tse Wai-Kit) est un étudiant qui gagne un peu d’argent comme coiffeur, notamment suivi par Mr Lam (Michael Miu Kiu-Wai), son agent de probation. Il partage une amitié avec Tung (Ricky Ho Pui-Tung), camarade de classe et collègue. Il fait également la cour à Yee (Cheung Yuen-Mei), sœur de Tung et dont le père, Ho (Wu Ma) est chauffeur de taxi. Quant à On, il n’est plus le malfrat d’antan. Jules de Fung (Carrie Ng Ka-Lai), il ne parvient à communiquer avec son fils dont l’attitude nuit à ses études. Proche du renvoi, Pang doit son salut à Miss Cheung (Sylvia Chang Ai-Chia), sa professeur. Parallèlement, lorsque Wendy (Suet Lee), collègue de Yee la trahit, Pang décide de la venger…
Avec A Rascal’s Tale, Dick Cho s’intéresse surtout, au-delà du film sur la jeunesse en voie de marginalisation et avec un contexte mafieux en filigrane à décrire l’incommunicabilité entre pères et fils. C’est le véritable sujet du film où les adultes tentent de comprendre leur progéniture mais aussi de trouver la solution pour qu’un dialogue s’instaure. L’auteur y décrit donc les relations conflictuelles intergénérationnelles d’une jeunesse et de leurs parents, notamment sous les traits de Pang. Ce dernier doit faire avec un père au passé criminel, et qui encore au moment présent vit de façon non-conformiste. Son comportement agit comme une répercussion de cette filiation et d’une identité qu’il se cherche, plus encore en l’absence d’une mère qui fait défaut. Sa posture révoltée contraste avec celle de son ami, Tung plus posé et réfléchit dont le père n’accepte pas les choix de son fils. Le film offre alors deux points de vue d’une même jeunesse et d’un manque de communication flagrant entre ces pères et ces « enfants », l’un issu du monde interlope, l’autre issu d’une famille plus traditionnelle. Il est intéressant de voir qu’ici, Dick Cho offre un parti pris tranché et invite l’autorité parentale à ouvrir le dialogue avant toute sanction hâtive.
Plus encore dans A Rascal’s Tale, le discours de Dick Cho se veut relativement positif puisqu’il nous montre des professeurs qui n’ont pas baissé les bras, et qui soutiennent et croient en la réussite de leur élève, passage obligé s’ils veulent s’ouvrir à un carrière professionnelle. Mais comme souvent dans le cinéma hongkongais lorsqu’il touche à la délinquance/criminalité ainsi qu’à une jeunesse qui se cherche, il y a toujours une part de fatalité qui vient enrayer un récit qui s’inscrivait alors au beau fixe. La nature désinvolte de Pang entérine cette situation en plongeant son entourage dans une spirale violente. Son acte vengeur réalisé par amour à des répercussions qui amèneront l’affrontement final à l’arme blanche, véritable bain de sang qui ramène nos personnages à leur condition propre. Ce dénouement et son climax respectent alors cette forme de sanction symbolique commune à ces productions mais qui a ici une résultante bénéfique. Ainsi et d’une certaine façon, le personnage de Shing Fui-On lavera par le sang sa condition, mais surtout elle lui permettra de se rapprocher de son fils et de renforcer les liens qui les unissent.
Drame sur une jeunesse qui prépare ses premiers pas dans la vie d’adulte, A Rascal’s Tale offre une histoire solide qui apporte une vraie réflexion sur l’éducation et les rapports parents/enfants. Des sujets dignes d’intérêts dont la conclusion chaotique ravira les fans d’actions à la machette.
Merci à Supavince (VCD)
A noter qu’au détour d’une scène chez les parents de Tung, un poster du film Gangs (1988) de Lawrence Ah Mon y est accroché. Un petit clin d’œil qui rappel que les acteurs Ricky Ho et Tse Wai-Kit y incarnaient des jeunes pris dans le tourbillon violent des gangs. Un clin d’œil qui renvoi également les deux films dans cette peinture d’une jeunesse rebelle, sauf l’issue qui est tout autre.
Du tout bon, Jacques! 😀