Watson
Co-scénariste et réalisateur de Back to Roots (1995), Raymond Leung Pun-Hei, qui se donne également un petit rôle signait-là une comédie dramatique sur le déracinement et la découverte d’une identité perdue.
Fai (Chan Wai-Lun) est une petite frappe qui agit pour les triades. Un contrat court sur un homme qu’il élimine. En fuite à Guangzhou, il apprend que la cible était un policier. Recherché par les forces de l’ordre, il parvient à leur échapper mais termine blessé. Il se réveille alors dans une province au nord de la Chine. Mal au point, il croise le chemin de Sau Sau (Wong Yim), une jeune femme qui alerte les hommes de son village…
Back to Roots rappelle un autre film, celui de Yim Ho : Homecoming (1984). A l’image de son contemporain, Raymond Leung traite du thème de l’en/(dé)racinement d’un individu et du contraste existant entre ville et village, goudron noir vs terre jaune. A la différence de ce film de la Nouvelle Vague, il met en scène un jeune déraciné qui ne connait rien de ses origines, ou si peu. Un jeune homme désinvolte et vulgaire vivant dans une société hongkongaise qui appréhende la rétrocession arrivant à grand pas. On parle ainsi de la menace que représente les chinois et des peurs qui sont traduites face à cet inconnu. A côté de cela, ce jeune homme se laisse vivre au jour le jour en s’adonnant à des actes criminels ainsi qu’à des orgies sexuelles. Si les choses se font de façon prévisible, il est intéressant de voir la finesse avec laquelle l’auteur dépeint son propos. On y découvre un personnage principal méprisant à l’égard de la vie rurale. On lui offre l’hospitalité, il ne fait preuve que d’irrespect. Les circonstances l’amèneront à s’ouvrir à ces vies simples et s’interpeller sur son mode de vie urbain. Il y découvre alors une « famille », des amis, des personnes qui tiennent à lui. A travers ce qu’il représente, on brise toutes formes de préjugés à l’égard de ces chinois du Mainland comme pour répondre aux peurs qu’ils suscitent à l’approche de la rétrocession de 1997.
On pourrait reprocher à Back to Roots son récit un peu commode qui ne réserve que peu de surprise sur l’issue du film. Il est vrai que Raymond Leung tombe dans ces facilités scénaristiques qui déroulent une histoire sans réelle complication. Un jeune individualiste qui change de personnalité au contact d’une population qui vit à l’exact opposé de ce qu’il connait. Et puis son intégration et l’acceptation d’un monde qu’il embrasse dorénavant. On n’est pas jamais bien loin de la caricature du citadin hostile à la différence. Et du coup, il est difficile d’aller chercher un parcours initiatique plus lisse qu’un tel discours. Un discours qui s’ancre dans une vision très-trop optimiste, et ce, même face à la fatalité qui frappe les villageois. Back to Roots est donc remplit de bons sentiments. Parallèlement à cela, l’auteur n’en fait jamais des tonnes. Il sait rester sobre dans sa démarche. Un parti pris qui sauve le film d’une lourdeur qui tendrait à vouloir trop souligner les caractères en opposition. De plus, le naturel des acteurs aident beaucoup à l’acceptation de ce récit. Le casting est convaincant dans cette façon qu’il a d’offrir des interprétations justes et touchantes. Quant à la mise en scène, elle offre de jolis plans sur une nature sauvage mais également entretenue par l’homme. Des plans d’ensemble qui renvoient à la vie fragile de ces hommes dans un environnement hostile.
Back to Roots est d’une narration simple et intelligente, quoique parfois un peu poussive. On suit avec intérêt ce jeune hongkongais qui renoue avec ses racines et donc son identité. Et à travers lui, on découvre un visage différent d’une Chine immense et diversifiée, belle et sauvage.
Merci à Toto14 (VCD)